Toxicophobie médicale

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#discrimination #santé #toxicophobie
Saucissound homme
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Bonjour à tous,
Je suis lecteur du forum depuis plusieurs années maintenant et je me suis enfin créé un compte.
Je suis usager de drogue depuis une dizaine d'année. Je suis professionnel de santé de formation et également chercheur en sciences sociales avec un attrait particulier pour la sociologie de la santé et dans ce cadre là, j'écris sur les discriminations des usagers de drogue en santé.
Je fais ce post pour vous parler d'un article que je viens de publier dans une revue médicale qui s'appelle "Suivi des femmes enceintes usagères de drogue : un exemple de toxicophobie médicale". Il fait suite à une enquête que j'ai menée dans des CSAPA.
Je vous en parle pour vous dire que c'est la première fois que le terme de toxicophobie médicale apparaît en recherche en sciences sociales en français. La littérature anglo-saxonne est plus prolixe sur les questions du "stigma" et de la discrimination, mais en français (à part du côté du canada francophone) il n'y a pas grand chose. C'est pour cette raison que je me suis dit que ça pouvait en intéresser certains d'entre vous.
J'ai par ailleurs créé deux pages sur Wikipédia : Toxicophobie, Discriminations des usagers de drogue. Je vous invite à aller les consulter et à les corriger, c'est comme ça que ça marche sur Wiki !

Je suis très enclin à envoyer le pdf par mail à tous les intéressés car il n'est pas en accès libre sur le net et à en discuter ici ou ailleurs, donc n'hésitez pas à me demander

Bonne journée à tous

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Bonjour, un point qui me parait important est que la notion d'addiction-maladie est une des sources de la toxicophobie parce qu'elle donne au corps medical le droit et surtout le "devoir" d'intervenir (après le devoir d'intervenir de la Police et de la Justice que la notion de maladie adouçit un peu). De ce fait ceux qui resistent au traitement ne peuvent être que "l'ennemi".

Mais les buveurs non excessifs d'alcool ou les fumeurs ne sont pas classés comme "malades" alors que les effets secondaires de la consommation pour la personne et pour la société sont, en proportion,  equivalents (en valeur absolue de coût pour la Société ils sont multipliés par 10 et plus par rapport aux drogues illégales).
Souvenons nous aussi du temps pas si anciens oû les homosexuels etaient aussi delinquants et/ou malades.

Je crois donc qu'il est important pour les PUD d'invoquer le droit à l'indifférence sur leurs consommations, à moins qu'eux même ne demandent de l'aide ou ne  nuisent à autrui.
Au même titre que les goûts alimentaires (y compris l'alcool), que les activités normales de la vie quotidienne ou que les religions pratiquées. Elle relèvent du domaine privé tant qu'elles y sont confinées.

Je me souviens d'une reunion au tout debut de mon investissement en addictologie avec des employeurs dont la question etait "que dois je faire si je découvre qu'un de mes employés se drogue ?". Notre (nous etions plusieurs) reponse a été rien. Soit il ne repond pas aux attentes de son emploi et c'est un problème qu'il se drogue ou non, soit il repond à ces attentes et ce n'est pas un problème, qu'il se drogue ou non.
Les emplois à risque constituent une exception prevue et encadrée par la Loi mais concerne tous les facteurs de risque.
Amicalement

Dernière modification par prescripteur (25 avril 2024 à  16:59)

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+1. Le droit à l'indifférence ! PTX.
 
Texte mis dans les morceaux choisis de Psychoactif. (pierre)

S'il n'y a pas de solution, il n'y a pas de problème. Devise Shadok (et stoicienne)

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Saucissound a écrit

Bonjour à tous,
Je suis lecteur du forum depuis plusieurs années maintenant et je me suis enfin créé un compte.
Je suis usager de drogue depuis une dizaine d'année. Je suis professionnel de santé de formation et également chercheur en sciences sociales avec un attrait particulier pour la sociologie de la santé et dans ce cadre là, j'écris sur les discriminations des usagers de drogue en santé.
Je fais ce post pour vous parler d'un article que je viens de publier dans une revue médicale qui s'appelle "Suivi des femmes enceintes usagères de drogue : un exemple de toxicophobie médicale". Il fait suite à une enquête que j'ai menée dans des CSAPA.
Je vous en parle pour vous dire que c'est la première fois que le terme de toxicophobie médicale apparaît en recherche en sciences sociales en français. La littérature anglo-saxonne est plus prolixe sur les questions du "stigma" et de la discrimination, mais en français (à part du côté du canada francophone) il n'y a pas grand chose. C'est pour cette raison que je me suis dit que ça pouvait en intéresser certains d'entre vous.
J'ai par ailleurs créé deux pages sur Wikipédia : Toxicophobie, Discriminations des usagers de drogue. Je vous invite à aller les consulter et à les corriger, c'est comme ça que ça marche sur Wiki !

Je suis très enclin à envoyer le pdf par mail à tous les intéressés car il n'est pas en accès libre sur le net et à en discuter ici ou ailleurs, donc n'hésitez pas à me demander

Bonne journée à tous

Saucissound a écrit

Bonjour à tous,
Je suis lecteur du forum depuis plusieurs années maintenant et je me suis enfin créé un compte.
Je suis usager de drogue depuis une dizaine d'année. Je suis professionnel de santé de formation et également chercheur en sciences sociales avec un attrait particulier pour la sociologie de la santé et dans ce cadre là, j'écris sur les discriminations des usagers de drogue en santé.
Je fais ce post pour vous parler d'un article que je viens de publier dans une revue médicale qui s'appelle "Suivi des femmes enceintes usagères de drogue : un exemple de toxicophobie médicale". Il fait suite à une enquête que j'ai menée dans des CSAPA.
Je vous en parle pour vous dire que c'est la première fois que le terme de toxicophobie médicale apparaît en recherche en sciences sociales en français. La littérature anglo-saxonne est plus prolixe sur les questions du "stigma" et de la discrimination, mais en français (à part du côté du canada francophone) il n'y a pas grand chose. C'est pour cette raison que je me suis dit que ça pouvait en intéresser certains d'entre vous.
J'ai par ailleurs créé deux pages sur Wikipédia : Toxicophobie, Discriminations des usagers de drogue. Je vous invite à aller les consulter et à les corriger, c'est comme ça que ça marche sur Wiki !

Je suis très enclin à envoyer le pdf par mail à tous les intéressés car il n'est pas en accès libre sur le net et à en discuter ici ou ailleurs, donc n'hésitez pas à me demander

Bonne journée à tous

Salut,

Je trouve ça très intéressant justement et super que quelqu’un qui y travaille fasse quelque chose. Donc j’aimerais bien avoir le pdf :)

Bien à vous


drugs are a requiem for a dream

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Saucissound homme
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prescripteur a écrit

Bonjour, un point qui me parait important est que la notion d'addiction-maladie est une des sources de la toxicophobie parce qu'elle donne au corps medical le droit et surtout le "devoir" d'intervenir (après le devoir d'intervenir de la Police et de la Justice que la notion de maladie adouçit un peu). De ce fait ceux qui résistent au traitement ne peuvent être que "l'ennemi".

Tout à fait et cela répond bien à ce que certains chercheurs appellent la médicalisation de l'usage de drogue. Le fait de médicaliser un comportement permet d'augmenter le contrôle opéré par les professionnels de santé en intervenant non plus sur une conduite mais bien sur une maladie et donc sur un malade. Cette médicalisation est à questionner car en son nom sont réalisés des choses qui personnellement me posent question.

prescripteur a écrit

Mais les buveurs non excessifs d'alcool ou les fumeurs ne sont pas classés comme "malades" alors que les effets secondaires de la consommation pour la personne et pour la société sont, en proportion,  equivalents (en valeur absolue de coût pour la Société ils sont multipliés par 10 et plus par rapport aux drogues illégales).
Souvenons nous aussi du temps pas si anciens oû les homosexuels etaient aussi delinquants et/ou malades.

C'est exact cf les excellents travaux de pierre kopp sur le cout social des drogues.

prescripteur a écrit

Je crois donc qu'il est important pour les PUD d'invoquer le droit à l'indifférence sur leurs consommations, à moins qu'eux même ne demandent de l'aide ou ne  nuisent à autrui.
Au même titre que les goûts alimentaires (y compris l'alcool), que les activités normales de la vie quotidienne ou que les religions pratiquées. Elle relèvent du domaine privé tant qu'elles y sont confinées.

Je me souviens d'une reunion au tout debut de mon investissement en addictologie avec des employeurs dont la question etait "que dois je faire si je découvre qu'un de mes employés se drogue ?". Notre (nous etions plusieurs) reponse a été rien. Soit il ne repond pas aux attentes de son emploi et c'est un problème qu'il se drogue ou non, soit il repond à ces attentes et ce n'est pas un problème, qu'il se drogue ou non.
Les emplois à risque constituent une exception prevue et encadrée par la Loi mais concerne tous les facteurs de risque.
Amicalement

D'ou toute la difficulté face à la question : mais je dois le dire ou pas ? Et franchement, dans certains cas, je suis sur qu'il vaut mieux ne pas le dire. 
Oui et d'ailleurs, au nom de ce soupçon, certains employeurs n'hésitent pas à invoquer des comportements qu'ils associent aux consos (du style il est arrivé quelques fois en retard, il a l'air fatigué) mais que, s'ils étaient associé à je ne sais quelle autre activité nocturne (gaming par exemple), n'inspireraient pas un tel soupçon et une telle volonté d'agir contre.

Merci beaucoup de votre retour en tout cas.
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Des choses qui posent question sont réalisées au nom de la médicalisation. PTX.

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pierre
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Saucissound a écrit

Je suis très enclin à envoyer le pdf par mail à tous les intéressés car il n'est pas en accès libre sur le net et à en discuter ici ou ailleurs, donc n'hésitez pas à me demander

Bonjour,

je veux bien avoir le pdf aussi. Merci.

Pierre

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pierre
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Saucissound a écrit

Tout à fait et cela répond bien à ce que certains chercheurs appellent la médicalisation de l'usage de drogue. Le fait de médicaliser un comportement permet d'augmenter le contrôle opéré par les professionnels de santé en intervenant non plus sur une conduite mais bien sur une maladie et donc sur un malade. Cette médicalisation est à questionner car en son nom sont réalisés des choses qui personnellement me posent question.

OUI !

A ce propos, je conseille vivement la lecture de cet article de Amnon Jacob Suissa "Addictions et pathologisation de l'existence : aspects psychosociaux". Je l'ai trouvé extrêmement éclairant sur le concept de maladie dans le domaine de la dépendance....

https://www.cairn.info/revue-psychotrop … age-61.htm


Bien que le concept de maladie ait été plus associé à l’alcoolisme au plan historique, le discours dominant dans le champ des dépendances s’appuie fondamentalement sur les quatre arguments classiques de Jellinek (1960) qui forment la pierre angulaire du discours associant dépendance à maladie, soit les caractéristiques de prédisposition, l’aspect progressif de la maladie, la perte de contrôle et enfin l’abstinence.

Quant à l’hypothèse voulant que l’addiction constitue un processus en progression à travers des étapes bien identifiables, la démonstration est loin d’être convaincante, et ce, pour les raisons suivantes. La plupart des personnes souffrant de ces dépendances ont utilisé cette substance ou cette activité d’une manière réactive, soit comme une stratégie d’équilibre devant un événement stressant de la vie (Peele, 2004 ; Valleur & Matysiak, 2003 ; Castellani, 2000). Ainsi compris, on peut se demander si la notion de processus progressif et inexorable ne relève pas d’une vision déterministe qui efface le potentiel des êtres humains à changer ou à adopter tel ou tel comportement.

Pour ce qui est de la notion de perte de contrôle, elle est fort controversée car elle fonde l’idée que, si un dépendant abstinent reprend ses psychotropes ou ses activités, il ne pourra alors s’arrêter. Au plan scientifique, les résultats montrent, au contraire, que les personnes peuvent exercer un certain contrôle sur leurs consommations ou réduire la fréquence et l’intensité de leurs activités addictives (Peele, 2004 ; Sobell, 2002a ; Hodgins et al., 2002).

En ce concerne l’abstinence, et bien qu’elle soit désirable quand on intervient auprès des personnes dépendantes, elle peut constituer un véritable obstacle quand elle est imposée comme une condition préalable au traitement. Soutenir que la rechute potentielle est le résultat direct d’un problème d’abstinence permet d’évacuer l’intentionnalité et les choix multiples des personnes dans le processus de décision alors qu’ils représentent justement la pierre angulaire du changement personnel et social.

Dans le meme article, lire aussi son avis sur les "mouvements nephalistes d'entraide anonyme", qui étiquette à vie comme malade, et qui est le contraire de l'émancipation.

Dernière modification par pierre (27 avril 2024 à  19:55)

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Pesteux homme
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Bonjour Saucissound. Pareil que Pierre, ça m'intéresse ton pdf !

Amicalement.

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Salut,
Je suis complètement intéressé pour recevoir ton pdf a ce sujet, pour diverses raisons, et en tant qu'usager depuis une dizaine d'années , et en tant que professionnel du social et de la rdr depuis quelques annees, et en tant que bientôt jeune parent ayant plus ou moins connu cette toxicophobie dans ce processus de parentalité.
Merci a toi de t'intéresser à cette thématique générale et à cet aspect précis en tout cas!

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Bonjour je suis aussi preneur du pdf si c'est possible. Amicalement

S'il n'y a pas de solution, il n'y a pas de problème. Devise Shadok (et stoicienne)

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